Poème(s) inédit(s) n°2
Extraits de Les vaches adorent les chiens, II) Les bras en croix.
L'ORANGE
Il ne s'écroula pas les bras en croix
mais tomba sur le cul
en skiant sur la neige
dans la montagne humide et bombée
Une lésion du coccyx amuse les idiots
mais handicape les buralistes
et les fonctionnaires dont la principale activité
consiste à rester tranquille sur une chaise
Il entendit les oiseaux chanter
vit passer les beaux jours du printemps
puis l'été, l'automne et les neiges suivantes
allongé sur le ventre
Un cul fêlé complique l'existence.
LA POMME-DE-TERRE
Le silence régnait sur les arêtes impossibles
le brouhaha gigotait en bas
drapé dans sa dignité malingre d'ermite
il parla aux limaces qui l'écoutèrent
Vous dont le corps si mou se traîne dans la fange
n'avez-vous pas eu cette vision étrange
d'un renard alangui pourchassé par les poules
sombrant dans la folie
L'idiot de la montagne sous un réverbère
vit venir des moustiques volant en escadrille
il découvrit ses gencives en souriant
une rafale meurtrière l'acheva
Il s'écroula les bras en croix.
LE CHOU-FLEUR
Il vit surgir sa femme en culotte d'organdi
juste sur sa descente de lit
Une rafale de vent secoua ses persiennes
une gambade secoua ses mollets
écarquillant les yeux il dressa la tête
elle frissonnait. Viens ! dit-il.
Quand l'amour mène la danse la pourriture
s'éparpille très loin dans la nature
si le fluide vital embrase et fructifie
la chair et l'idée éclaircit
Elle s'écroula les bras en croix
orgasmiquement déliquescente et heureuse
Il retourna à ses prairies
Une rafale de vent secoua les persiennes
une secousse nocturne agita ses mollets
Il gardait sa vigeur pour la prochaine danse
mais sur une savonnette glissa
et s'écroula les bras en croix
le front sur le lavabo
Il est mort viril.
(D'autres poèmes & une bio-bibliographie d'Alfonso Jimenez ICI ...)